Les grandes tendances 2024 pour la transformation digitale

Écrit par: Colin McMahon
2/12/2024

Temps de lecture: 7 min.

Quelles sont les prochaines étapes ? Aux yeux du grand public, 2023 fut l’année de l’IA, notamment grâce à l’émergence de cette intelligence artificielle générative dont ChatGPT est emblématique. En réalité, bien d’autres changements ont marqué l’année écoulée et il en sera probablement de même pour l’année venir. En effet, les grandes tendances de la transformation digitale en 2024 ne se limitent pas aux facteurs les plus médiatisés. D’autres forces, moins connues, contribuent également à les façonner. Nous avons identifié sept tendances de fond à fort impact. Il s'agit du développement de produits en mode Agile, du développement durable, de l'évolution de la main-d'œuvre, de l'informatique spatiale, de la cybersécurité et, bien sûr, de l'IA.

L’adoption du développement de produits en mode Agile

L'agilité est un concept nébuleux. De nombreuses entreprises assurent qu'elles sont Agiles, alors qu'elles ne sont qu'agiles… La différence que marque cette majuscule est déroutante, n’est-ce pas ? Les curieux pourront consulter notre livre blanc sur la compréhension des principes fondamentaux de la conception Agile de produits, mais, pour le dire rapidement, il s'agit essentiellement de travailler avec des cycles de développement continus et itératifs plutôt que par des étapes d'approbation. La méthode Agile encourage la communication quotidienne, le retour d'information continu et la collaboration inter services rapide vers un objectif convenu et quantifiable.

Les entreprises qui adoptent véritablement la méthode Agile dans la création de produits physiques ont tendance à observer une uniformisation des rythmes de production, des niveaux de risque réduits et de meilleurs délais de rentabilité. PTC a récemment mené une enquête sur la transformation digitale. Les répondants devaient entre autres auto évaluer leur niveau d’adoption des nouvelles technologies et solutions en matière de développement produit. 28 % des répondants qui se considéraient comme « bien avancés » mettaient en œuvre et exploitaient pleinement les pratiques Agiles. La tendance montre que les entreprises à la traîne sont peu enclines à s’approprier les pratiques Agiles. En effet 25% de ces entreprises à la traine déclarent ne pas les avoir adoptées contre seulement 19% des leaders.

Notre étude révèle également un investissement notable dans l'Agilité par tous les répondants (même si, naturellement, les leaders avaient tendance à être plus avancés). À mesure que les avantages de la méthode Agile gagneront en évidence dans le développement de produits physiques, nous nous attendons à ce que se creuse l’écart entre leaders et retardataires. Parallèlement, l’usage des principes Agile s’intensifiera. Ils ont déjà révolutionné le monde du logiciel, et en 2024, ils s’apprêtent à conquérir le "hardware" (objets physiques et équipements).

Quand software and hardware deviennent inséparables

Marc Andreessen, un des grands visionnaires du web, prédisait que le logiciel dévorerait un jour le monde. Le propos a beau être symbolique, il n’en est pas moins lucide. On observe une présence croissante des logiciels dans des domaines d’où ils étaient autrefois absents, y compris dans les objets et équipements. Les produits connectés se sont imposés, modifiant les attentes des clients, les normes et la conformité réglementaire pour les fabricants. Pour assurer leur synergie, appareil et logiciel sont souvent développés côte à côte ou, du moins, avec une communication renforcée entre les équipes.

En 2024, alors que les logiciels poursuivront leur conquête de territoires nouveaux, la collaboration entre les équipes se renforcera. Cette synergie renforce l’importance de la gestion du cycle de vie des applications (ALM - Application lifecycle management), concernant notamment le contrôle du développement, la maintenance et la conformité aux réglementations. L'ALM pose les bases d’une collaboration réussie entre les équipes en charge des logiciels et des produits, assurant une meilleure communication et moins d'incidents. Bien que l'ALM ne soit pas intrinsèquement Agile, leurs principes et méthodes se recoupent souvent. De quoi renforcer son adoption côté hardware.

PTC est convaincu par la pertinence de l'ALM pour les entreprises en cours de transformation digitale. Voilà pourquoi, en 2022, nous avons fait l’acquisition d'une technologie ALM de pointe : Codebeamer. Les logiciels ont changé le monde et les produits intelligents nécessitent une infrastructure qui garantit leur efficacité et leur conformité.

L'usage de l’IA ne se généralisera pas sans difficultés

2023 fut exceptionnelle pour l'IA, et cette dynamique ne montre aucun signe de ralentissement. Toutefois, l’avenir ne sera pas tout rose. Sasha Luccioni, chercheuse spécialisée en éthique de l’IA, a récemment donné une conférence TED (vidéo ci-dessous) qui livre des conclusions mitigées. Non, l'IA n'est pas prête à remplacer la main-d'œuvre humaine. Certes, elle aura son utilité, mais elle ne sera pas sans inconvénients.


Une bataille juridique est d’ailleurs engagée. Les auteurs, les artistes et autres créateurs refusent avec vigueur que l’œuvre d’une vie puisse être exploitée sans consentement ni compensation. Étant donné la ferveur des affrontements, on imagine mal que l’usage de l'IA générative ne soit pas infléchi par une forme de réglementation.

Par ailleurs, l’afflux vers les outils d'IA générative a fait apparaître des biais et des incohérences. Des outils comme ChatGPT ne perçoivent pas la différence entre vérité et fiction, de même qu’ils ne possèdent aucune moralité innée. Sur certains sujets, ils induisent en erreur les utilisateurs avec des réponses fausses ou obsolètes. Autre exemple, les IA génératrices d’images entretiennent les stéréotypes et les biais de genre lorsqu’elles génèrent des images pour illustrer des métiers. Les requêtes même rédigées de manière neutre font largement apparaître un homme occidental autour de la cinquantaine quand il s’agit d’imaginer un PDG et des femmes quand il s’agit d’illustrer le rôle d’assistant – reproduisant ainsi les clichés sexistes.

Néanmoins, les avantages de l’IA la rendent irrésistible. De nombreuses entreprises la mettent déjà à contribution pour améliorer et rendre plus intelligents leurs produits mais aussi soulager les employés de certaines tâches. Ses applications, cependant, vont bien au-delà dans l’industrie manufacturière. PTC utilise déjà la conception générative, un outil d'IA qui aide les ingénieurs à explorer de nouvelles options de conception et d'utilisation des matériaux et fournit automatiquement des modèles CAO efficaces.

L'IA est également utilisée par Vuforia Step Check, un outil de réalité augmentée conçu pour faciliter et améliorer l'inspection visuelle dans le cadre du contrôle qualité. Lors des tests, l'IA embarquée dans la solution peut détecter des assemblages non conformes, des pièces manquantes ou mal alignées, ou tout autre défaut connexe. Elle informe les opérateurs sur le succès ou l'échec de l’étape d'inspection en cours. La solution ThingWorx exploite aussi les capacités d'IA sous forme de machine learning. Cette technologie permet de construire des modèles d'analyse de données complexes aidant les opérateurs à mieux comprendre le fonctionnement de leurs équipements et à identifier les points d’amélioration. L'IA, bien qu’entourée d’un battage médiatique, n'est qu'un outil. Cependant, il s’agit probablement de l’outil le plus polyvalent et le plus puissant jamais créé par l'humanité. 2024 sera sans doute une année charnière qui définira à la fois les perspectives et les limites de l’IA.

La mise en œuvre de pratiques durables s’intensifiera

Les signes du changement climatique se sont malheureusement accumulés en 2023. Que l’on songe aux violentes tempêtes, aux sécheresses, ou à ces feux de forêt destructeurs d’habitats et de vies. Alors que la crise climatique s'aggrave et que l’opinion publique exige l’action, les gouvernements (et les actionnaires) tendent l’oreille. Depuis le 1er octobre 2023, l'UE a mis en place son Mécanisme d'Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) pour mesurer et taxer tout produit avec une forte empreinte carbone pénétrant le territoire.

Le message est clair : si les entreprises continuent d'ignorer ou de minimiser leurs empreintes environnementales, les réglementations leur feront savoir, et de façon coûteuse. Malgré les défis qu’elle représente, la prise de conscience environnementale offre également de réelles opportunités. La pression exercée incite à la performance. Les données sont formelles : les entreprises qui atteignent leurs objectifs de développement durable ont tendance à surpasser leurs concurrents. Bien sûr, cela suppose une fine compréhension de chaque processus existant. Or, la transparence est l'un des objectifs majeurs de la transformation digitale. En effet, des solutions logicielles comme les outils PLM ou la réalité augmentée permettent aux industriels d’obtenir une meilleure visibilité des impacts de leurs processus opérationnels. Si la data issue de ces outils peut révéler des points faibles, elle montre aussi des pistes d'amélioration.

Le plus souvent, le développement durable est exclusivement envisagé en termes de protection environnementale. Pour autant, ces efforts peuvent aussi être perçus sous l’angle du profit. Par exemple, le Groupe Carlsberg a amélioré ses pratiques environnementales dans le cadre d'une initiative plus large visant à accroître l'efficacité des équipements. En connectant ses systèmes et en ayant une meilleure visibilité de ses processus, le Groupe Carlsberg a pu réduire les déchets, modérer les coûts et améliorer son empreinte carbone.

La durabilité ne sera plus vue comme une option. Les entreprises proactives en la matière, celles qui en feront un axe central de leur transformation digitale, en tireront un avantage concurrentiel sur celles qui vivent cette dynamique comme une contrainte.

L’évolution de la main-d'œuvre bousculera les mentalités

La génération Z, désormais bien implantée dans le monde de travail, constituera un jour la totalité des nouvelles embauches. Durant quelques années, elle restera une minorité de la main-d'œuvre, pour autant le constat est clair : ces nouveaux talents nés avec le numérique arrivent sur le marché du travail, et les workflows traditionnels ne répondent pas à leurs attentes. Chaque génération est façonnée par le monde dans lequel elle a grandi, et la génération Z est sensible au changement climatique, à la responsabilité sociale, à la flexibilité et aux flux de travail numériques.

Cette génération Z est davantage susceptible de bousculer les méthodes de travail et d’insuffler un vent nouveau dans les organisations notamment en faveur du développement de produit Agile. De récentes données PTC montrent que les entreprises se qualifiant de retardataires évoquent la réticence interne comme un obstacle au développement Agile de produits. Les retardataires étaient 72 % à l’identifier comme le principal obstacle, soit quasiment le double du même sentiment chez les leaders (40 %).

Bien que l'âge et l’attachement aux traditions ne soient pas exactement corrélés, on imagine aisément que les fabricants ayant une longue expérience de l'industrie soient moins portés sur de nouvelles méthodes de développement des produits. Lorsqu'ils les perçoivent comme insuffisamment testées, ils craignent de prendre de trop gros risques. Quoi qu'il en soit, la méthode Agile est un excellent exemple de flux de travail numérique. Ses plus grands avantages sont probablement ressentis dans des environnements de travail hybrides et flexibles.

Les aspirations de la génération Z pointent la nécessité de faire évoluer des pratiques. C'est la première génération née avec Internet. La génération Alpha et les suivantes ne feront qu'accentuer cette préférence pour le numérique au travail.

L’accélération de la transformation spatiale

L'informatique spatiale a évolué ces dernières années. En 2015, l'Oculus Rift a fait sensation, et des dispositifs comme les Google Glass et les Microsoft HoloLens ont permis à la réalité augmentée de percer dans des environnements professionnels. Ces technologies communiquent un même message : le numérique devient spatial. Si la transition est en cours, ses prémices remontent à environ huit ans.

L'ajout d'un contexte spatial permet aux utilisateurs d'interagir avec les données et le contenu, à la fois plus facilement et plus efficacement. Il optimise la maintenance et la collaboration à distance : l’utilisateur vit l’espace comme s'il y était. Les données de PTC montrent que 62 % des répondants envisagent déjà ces types de solutions, ou prévoient de le faire à court terme.

En gestation depuis quelques années, la révolution spatiale pose les bases technologiques qui propulseront l'expérience numérique vers de nouveaux horizons. La sortie de la Vision Pro d'Apple (présentée dans la vidéo ci-dessous), en 2024, représente la prochaine étape clé de cette transformation. Jusqu'à présent, le mouvement fut lent et progressif, mais l’accélération se fera avec l’accroissement du nombre d’utilisateurs, chez les professionnels et les particuliers.

 

Chez PTC, l’exploration et le développement de solutions de calcul spatial font partie intégrante de notre feuille de route depuis de nombreuses années. Des programmes comme Vuforia Spatial Toolbox, et des concepts comme notre métavers industriel, témoignent de nos efforts dans ce domaine. Bientôt, nous aurons très probablement d'autres passionnantes avancées à annoncer...

Toute cette évolution s’accompagne d’un besoin constant de cybersécurité. La cybercriminalité gagne en sophistication, et en partie grâce à l'IA. Heureusement, cette dernière sera également utilisée pour tester et affiner la protection des données. Ce mouvement s’inscrit toutefois dans une plus large évolution : celle du concept Secure by design. Face à l’augmentation du nombre et de la gravité des cyberattaques, les développeurs informatiques adoptent une démarche proactive en intégrant la sécurité dès la phase de conception des logiciels. Cette approche implique l’évaluation des risques et la mise en place de contrôles appropriés tout au long du cycle de vie de l’application. Il en résulte un renforcement des infrastructures qui réduit le risque de violations accidentelles de données et protège contre les activités malveillantes.

Cette intégration de la notion de sécurité dès la conception devenant la norme, les entreprises peuvent s'orienter vers la « cyber-résilience ». Le National Institute of Standards and Technology, la définit comme cette « capacité à anticiper, résister, se rétablir et s'adapter à des conditions défavorables, des stress, des attaques ou des compromissions sur des systèmes qui utilisent ou sont activés par des ressources cybernétiques ». Mark Simos, de Microsoft, en parle ici plus précisément :

En intégrant et en automatisant davantage leurs infrastructures, les organisations accèderont à une visibilité inédite. La cyber-résilience, au-delà d’être une priorité pour l’avenir, devient un atout supplémentaire porté par la transformation digitale.

Conclusion

2024 ne s'en tiendra pas à la transformation digitale seule. Rien n'existe dans le vide et nombre d’innovations sont directement corrélées les unes aux autres. L'IA, par exemple, apportera son lot d’évolutions sur le monde du travail, jouera un rôle crucial dans l'amélioration des workflows existants et ouvrira de nouvelles opportunités de business. Il en va de même pour l'informatique spatiale, l'Agilité et l'intérêt croissant accordé au développement durable. Il y aura probablement des surprises en 2024, mais une certitude cependant : le numérique continuera de transformer le monde physique.

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Tags: Gestion du cycle de vie des applications (ALM) Connectivité industrielle Agile Appareils connectés Transformation numérique Conception générative Durabilité

À propos de l’auteur

Colin McMahon

Colin McMahon is a senior market research analyst working with PTC’s Corporate Marketing team, helping to provide actionable insights, challenging perspectives, and thought leadership on trends, technologies, and markets. Colin has been working professionally as a research analyst for many years, and he enjoys examining and evaluating just how large the overall impact of digital transformation technologies will be. He has a passion for augmented reality and virtual reality initiatives and believes that understanding the connected ecosystem of people and technology is key to a company fully realizing its potential in the 21st century.