L’industrie ne peut s’occuper seulement de productivité et de performance. Son impact environnemental et social s’impose comme un des points de focus majeur pour les décideurs, à la fois pour favoriser l’émergence de nouveaux modèles économiques mais aussi pour attirer les talents des jeunes générations. Avec l’éco-circularité, les promesses sont grandes mais les défis immenses ! Comment le numérique peut aider les industriels à embrasser ce changement ?
Dans une économie linéaire, un produit suit toujours plus ou moins le même schéma : des matières premières sont extraites puis transformées en produit ou service qui est alors commercialisé avant de signer sa fin de vie. « Le processus, ici, est clairement linéaire. L’idée avec l’éco-circularité, c’est de passer d’une ligne à une boucle. Autrement dit, créer un cercle à travers du sourcing de proximité, de l’éco-conception, des matières réinjectées dans la chaîne de valeur,… Au final, le produit a une deuxième, troisième, quatrième vie ! » explique Caroline Félix, directrice générale de de la Ruche Industrielle association promouvant des projets inter-entreprises.
En cela, l’éco-circularité fait écho à l’économie d’usage. Elle porte un modèle économique radicalement différent : « d’un côté, nous avons la vente d’un produit que l’on n’entretient pas ; de l’autre, nous mettons en place la vente d’un usage avec des structures d’entretien et de renouvellement » souligne Christine Champoiral, directrice générale de Montabert, fabricant de brise-roches et perforateurs hydrauliques. Et de préciser comment cela pourrait se traduire concrètement : « Dans le cas de Montabert, notre ressource principale est l’acier et donc nous nous posons la question : comment gérer les tonnes d’acier en fin de parcours ? Et si, au lieu de vendre des perforateurs, nous vendions des mètres forés ! »
Mais le chemin est long avant d’espérer une transition vers le modèle de l’éco-circularité. En 2022, une étude du Forum pour l’investissement responsable et l’Institut national de l’économie circulaire rapporte que la moitié des entreprises interrogées évoque la stratégie d'économie circulaire « parmi les sujets de durabilité et non comme un enjeu stratégique en tant que tel. »
Le défi est immense, mais rien n’empêche d’essayer. Montabert a développé plusieurs initiatives éco-circulaires. Pour y parvenir, l'entreprise s'est appuyée, entre autres, sur sa participation à deux groupes de travail inter-entreprise au sein de la ruche industrielle. Des groupes de travail dénommés « grappes ».
Les projets mis en place au sein de Montabert sont prometteurs, mais il reste encore des obstacles à lever pour passer à une autre échelle :
Justement, la technologie et le numérique ! Quelles sont les opportunités ? « Au sein de la Ruche Industrielle, nous réalisons que le digital et l’économie circulaire sont complémentaires » observe Caroline Félix. Dans cette optique, les éditeurs de logiciels auront un rôle à jouer :
Chez Montabert, la continuité numérique va émerger comme un sujet de premier ordre, notamment au regard des enjeux de traçabilité. D’un côté, l’idée est de pouvoir agir sur la gestion et le pilotage des données afin d’améliorer la traçabilité des matières premières et l’optimisation des cycles de vie du produit. De l’autre, le digital va pouvoir aider à développer le diagnostic à distance : « nous avons des machines opérant au Tibet ou dans des mines en Amérique latine. La question est : comment, avec le digital et à des milliers de mètres sous terre, pouvons-nous suivre la durée de vie des composants et apporter de l’information à nos clients ? »
Et Caroline Félix de conclure : « si la continuité numérique était en place, on pourrait plus facilement passer du modèle linéaire à un modèle circulaire. »